Relation client Le défi du tout connecté
28/02/2019 Palmeraie Country Club – Casablanca
Assoir une relation pérenne avec son client est l’objectif ultime de toute entreprise. Smartphones, PC et tablettes, les clients sont tout le temps connectés. Les attirer et les fidéliser devient un véritable défi face au comportement de «zapping» qui va avec cette «connectivité».
Le comportement individuel évoluant plus vite que l’entreprise, la relation client est aujourd’hui appelée plus que jamais à muter. A l’heure du tout connecté, le client exige d’être en contact avec l’entreprise à tout moment, n’importe où et quel que soit le canal (voix, email, chat, messagerie instantanée ou réseaux sociaux). Dans un tel contexte, il est impératif de mieux connaître sa clientèle, ses besoins, ses comportements et de la servir au mieux à travers ces divers canaux. Pour ce faire, chez le cabinet Accenture par exemple, on avance cinq fondamentaux à respecter. Il s’agit en l’occurrence de l’identification systématique en amont du client, du modèle relationnel différencié en fonction du profil ou du segment client, de l’orientation du client sur le canal le plus adapté à son besoin et au traitement de sa demande, du self-care et de la robotisation qui permettent de libérer du temps pour les conseillers pour le traitement des demandes à valeur ajoutée ou complexes et enfin de l’enrichissement de la connaissance client à chaque interaction quel que soit le canal utilisé.
Tout pour la valeur
Toujours dans le même sillage, Yacine Sekkat, partner au cabinet conseil McKinsey, précise que pour répondre à ces nouveaux enjeux que dictent le tout connecté et le tout digital, il faut observer quatre prérequis avec à leur tête le repérage de ce qui génère la valeur. Pour Sekkat, il est question «de mettre des chiffres devant des use case, ce qui est le plus simple mais le moins fait chez mes clients». Il est donc impératif de détecter ce qui permet de dégager du profit pour l’entreprise avant d’entamer tout processus de gestion de la relation client. Le deuxième prérequis, d’après Sekkat, est de «ne pas sous-estimer la machine qu’il faut mettre en œuvre pour aller capturer ces valeurs, ça suppose de revoir l’organisation. De voir comment est-ce qu’on arrive à attirer ces nouveaux cadres digitaux. Comment on va faire travailler les équipes SI et les métiers ensemble pour atteindre ces valeurs». Le troisième pilier repose sur «la data. L’expérience montre que les entreprises ont suffisamment de data en interne et n’ont pas un besoin d’aller la chercher ailleurs, sauf qu’elle est très loin d’être exploitée à sa juste valeur. Il faut aussi l’exploiter et la rationnaliser», poursuit Sekkat avant de préciser que le quatrième prérequis est de définir comment opérationnaliser tout ceci, via le change management. L’un des cas illustrant la capacité de l’outil digital à drainer de la valeur, est celui d’une compagnie d’assurance, cliente du cabinet McKinsey, dont 35% de sa clientèle ne renouvelle pas sa police d’assurance, ce qui équivaut à près de 1 milliard de dirhams de chiffre d’affaires qu’il faut reconquérir et dépasser pour faire de la croissance. Pour capter une partie de cette clientèle oisive, la compagnie a déployé un algorithme qui permet d’identifier les clients dont elle est sûre qu’ils ne vont pas renouveler leurs polices. Les efforts de contact et de rappel ont ainsi été concentrés sur une petite population de clients au lieu de relancer l’ensemble de la clientèle. Les résultats de cette démarche ont été démontrés. La compagnie a pu assurer 240 millions de dirhams additionnels. Si ce cas édifiant prouve l’utilité du recours à la technologie, il n’empêche pas Sekkat d’alerter sur le fait que «le digital ne devrait pas être une stratégie en soi mais doit faire partie de la stratégie d’entreprise. Le digital a pour rôle d’aider l’entreprise à atteindre cette stratégie».
Digitaliser pour digitaliser ?
Abondant dans le même sens, Siham Elmejjad, président-directeur général de 2WLS, précise qu’«il ne faut pas digitaliser juste pour digitaliser mais il faut partir d’un objectif». Pour la spécialiste de la fidélisation client, «quand la question de la relation client est évoquée, il est impératif d’analyser la problématique dont souffre l’entreprise ou la marque et savoir ce qu’on veut atteindre. Il est aussi important de préciser les comportements qu’on veut encourager chez les clients. Ce n’est qu’une fois ces éléments définis, tout autant que le plan et le programme, qu’il est possible de digitaliser». Une opinion partagée par Malika Ahmidouch, directeur des activités digitales à Intelcia, qui précise que «l’objectif principal de la digitalisation est l’amélioration de la satisfaction client». De con côté, Hassan Rouissi, directeur associé à The Next Clic, estime qu’il faut d’abord bannir la rupture entre le digital et le non digital car elle n’a plus aucun sens. L’entreprise doit aussi avoir une vision centrée sur le client. Malheureusement les entreprises continuent aujourd’hui à tenir compte de leurs propres contraintes que celles réelles des consommateurs. «Changer d’attitude et devenir plus empathique vis-à-vis du client permettrait au final de lui offrir un service et des produits qui correspondent beaucoup plus à ce qu’il souhaite avoir. Un changement qui permettrait aux entreprises d’en tirer le plus de profit et de se démarquer», martèle-t-il.
Un client à satisfaire
Une satisfaction qui ne peut être atteinte sans une bonne connaissance des clients qui permet ainsi de les fidéliser. Pour Elmejjad, la fidélisation est justement un métier hautement technologique. «Il est difficile d’envisager de fidéliser un client dans le cadre d’une grande organisation si on ne dispose pas d’outils technologiques puissants et à la pointe de la technologie pour pouvoir analyser le comportement des clients, les mieux connaître et connaître leurs profils». Et c’est cette connaissance qui permet d’adapter l’offre et l’approche, maximisant au passage ce niveau de satisfaction. Toujours selon la professionnelle, la fidélisation à travers des interactions qui sont d’abord permises par le client, personnalisées, et surtout pertinentes et utiles pour les utilisateurs permettent de transformer les clients de passages et les clients occasionnels non seulement en clients fidèles mais surtout en clients ambassadeurs et partenaires de la marque. Le partenariat se traduit par des feed-backs positifs ou négatifs qui permettent l’amélioration du produit ou du service que propose la marque. Quant au client ambassadeur, ce dernier, en plus d’être fidèle par des achats répétés, témoigne positivement autour de la marque, devenant ainsi un commercial gratuit. «Si une entreprise disposant de 1 million de clients arrive à convertir 10% en ambassadeurs, elle disposera de 10.000 commerciaux gratuits, alors qu’aucune entreprise ne peut s’offrir 10.000 commerciaux», souligne Elmejjad. L’autre niveau de la fidélisation est la personnalisation. «Les clients sont, en effet, plus sensibles aux récompenses immatérielles (traitement spécial, montée dans le segment…) qu’aux récompenses matérielles», lâche la spécialiste. Le client doit être donc au centre de la réflexion pour la mise en place d’une stratégie digitale. Il en va de la profitabilité de l’entreprise.